06/03/2025

Le 1er octobre 2024 marquait l’entrée en vigueur d’une nouvelle tarification applicable lors de l’intervention des huissiers de justice. Les dettes d’énergie pour lesquelles le fournisseur a obtenu une condamnation en justice sont concernées par cette réforme.

Pour récupérer le montant d’une dette d’énergie, le fournisseur d’énergie (ou la société qui lui a racheté la dette d’énergie) procède souvent en deux étapes successives :

  •  Le recouvrement amiable, par lequel le fournisseur essaie d’obtenir un paiement pour une dette qui n’a pas été vérifiée par un juge.
  •  Le recouvrement judiciaire qui implique de demander en justice le paiement de la dette, et d’obtenir gain de cause devant le juge.

Le recouvrement d’une dette reste parfois dans la phase amiable, sans jamais passer au recouvrement judiciaire.

Intervention de l’huissier de justice

L’huissier de justice peut intervenir pour les deux étapes : le recouvrement amiable et le recouvrement judiciaire. Mais il n’a pas les mêmes pouvoirs ni les mêmes ressources en fonction du type de recouvrement. L’huissier pourra uniquement recourir à la force publique, et donc forcer le consommateur à payer, lorsqu’il y a un jugement qui reconnait que la dette est due (recouvrement judiciaire). Dans ce cas, l’huissier pourra procéder à des saisies sur les revenus et les biens du consommateur qui est débiteur[1] de la dette.

La réforme des tarifs que l’huissier peut réclamer pour son intervention concerne le recouvrement judiciaire, donc avec un jugement reconnaissant la dette du consommateur. L’huissier réclame le paiement de ces tarifs au créancier dans un premier temps. Mais il les récupère ensuite auprès du consommateur débiteur, en plus de la dette proprement dite.

Si le fournisseur a introduit son action en justice via une citation, c’est un huissier qui apporte la convocation en justice au consommateur d’énergie. Les tarifs réformés s’appliquent aussi à cette intervention de l’huissier, même si elle a lieu avant le jugement. L’huissier pourra récupérer le coût de son intervention pour la citation auprès du consommateur qui a perdu en justice, si le juge en décide ainsi.

Ces nouveaux tarifs poursuivent les objectifs annoncés d’être plus clairs, de permettre de savoir dès le départ combien l’intervention d’un huissier va coûter, et de ne pas mettre encore plus en difficultés le débiteur. Mais la clarté de ces nouveaux tarifs est mise en doute par le secteur associatif qui accompagne les personnes endettées. Ils pourraient aussi faire augmenter le coût de l’intervention de l’huissier dans de nombreux cas.

 

Impact de la réforme sur les dettes d’énergie

Les actes de l’huissier liés à la récupération des dettes d’énergies reçoivent un cadre spécifique dans cette réforme des tarifs de l’huissier.

Nous avons tenté l’exercice d’anticiper le coût de l’intervention de l’huissier pour :

  • la citation en justice pour une dette d’énergie,
  • le recouvrement de la dette d’énergie après un jugement.

Nous pouvons prévoir plus précisément le coût d’une citation en Justice que l’huissier pourra répercuter sur un consommateur qui a été condamné en justice à payer la dette :

  • 125 € pour des « honoraires graduées » ;
  • 18 € d’indemnité de déplacement parce qu’en principe, l’huissier se présente au domicile de la personne citée en justice pour lui remettre en main propre la citation ;
  • 2,76 € de dépense d’inscription de l’acte au Registre central des actes dématérialisés
  • Il faut soustraire un montant de 100 € payé par le Fond de solidarité de la chambre nationale des huissiers de Justice.

Soit un total de 45,76 € (auquel il faut ajouter la TVA et l’intervention au profit du Fond d’aide juridique de 2e ligne - 26 € en mars 2025) qui peuvent être réclamés à un consommateur d’énergie pour une citation en justice concernant le paiement d’une dette d’énergie[2],[3].

 

Nous pouvons prévoir plus précisément le coût du recouvrement de la dette par un huissier après une décision de justice :

  • 50 € de forfait pour les frais de dossier administratif.
  • Un « honoraire de recouvrement » de :
    • 100 € pour les dettes dont le montant global (dette principale + intérêts + frais) atteint 1.250 € ou plus ;
    • ou 8% du montant total (donc moins de 100 €) pour les dettes dont le montant n’atteint pas 1.250 €, avec un minimum de 15 €.
  • 25 € d’honoraire supplémentaire par an si l’huissier a commencé des démarches pour procéder à une saisie. Si un plan de paiement est négocié avant toute démarches de saisie, les 25 € d’honoraires complémentaires ne seront donc pas dus tant que le plan est respecté[4].

Quelques précisions sur le coût de l’intervention de l’huissier pour une dette d’énergie :

  • Les montants repris ici sont les montants applicables en 2024 qui seront indexés chaque année au 1er janvier.
  • Le forfait de 50 € pour les frais de dossier administratifs comprend à la fois la rémunération de l’huissier, et le remboursement de ses dépenses pour : toutes les démarches effectuées et tous les échanges avec le débiteur concernant le paiement et la négociation d’un plan de paiement. À savoir : les démarches pour identifier le débiteur, savoir où le contacter, et vérifier s’il est solvable, mais aussi toutes les démarches administratives pour la gestion du dossier de recouvrement, notamment la correspondance avec le débiteur, rappels et sommations compris. L’huissier ne peut facturer aucun frais spécifique supplémentaire pour ces démarches.
  • Si le consommateur débiteur paie la dette à la suite d’une intervention de l’huissier (même un simple rappel), l’huissier pourra réclamer l’honoraire de recouvrement en plus du forfait pour les frais de dossier administratifs. Cet honoraire pourra être réclamé même si le paiement effectué est un paiement partiel, et même si ce paiement n’est pas fait à l’huissier mais directement au créancier.
  • A partir du moment où l’honoraire de recouvrement est dû à l’huissier, 8% de chaque paiement fait par le débiteur est consacré à l’honoraire de recouvrement, jusqu’à ce qu’il soit payé entièrement.
  • Si l’action en justice a été introduite par citation : l’huissier pourra répercuter sur le débiteur le coût de la citation, et le forfait de 50 € pour frais administratifs, même si le consommateur paie directement sa dette à la suite du jugement[5], sans attendre aucune intervention de l’huissier.

En revanche, si l’action en justice n’a pas été introduite par citation, l’huissier ne pourra pas réclamer le forfait de 50 € si le consommateur paie directement à la suite du jugement ou respecte à la lettre le plan de paiement accordé par le juge.

  • Pour chaque acte spécifique de l’huissier en dehors des échanges avec le débiteur concernant le paiement et la négociation d’un plan de paiement, l’huissier pourra réclamer des montants supplémentaires. Par exemple, pour toute saisie, ou pour une signification du jugement (sa communication officielle par l’huissier avant d’entamer les démarches de recouvrement judiciaire).

 

Quelques informations générales sur la réforme des tarifs :

  • Dans chaque acte et chaque décompte, l’huissier doit indiquer chaque prestation correspondant à un tarif appliqué, en toutes lettres, dans un ordre précis, afin de faciliter le contrôle et la vérification.

 

  • Les postes appelés « honoraire(s) » servent à rémunérer l’huissier, tandis que les postes intitulés « dépenses », « frais » ou « indemnité » sont prévus pour rembourser l’huissier des dépenses qu’il a dû avancer.
  • L'huissier ne peut plus réclamer des droits d'acomptes, c'est-à-dire la perception d’un montant pour chaque paiement du débiteur.
  • Un tableau reprenant les différents tarifs de manière synthétique est proposé sur le site internet de Chambre nationale des huissiers de justice qui présente ce tableau comme un « tarif checker », en anglais dans le texte. Il s’agit cependant d’un simple tableau informatif qui ne propose aucune assistance pour vérifier si les montants réclamés au cas par cas par les huissiers sont légaux, corrects et entièrement justifiés.  
 

[1] Le débiteur est la personne qui a l’obligation de payer la dette.

[2] Les montants indexés au 1er janvier 2025 pour une citation sont : 128,85 € à la place de 125 € pour les honoraires gradués ; et 18,55 € à la place de 18 € pour l’indemnité de déplacement. Le coût total de la citation atteint donc 50,16 €.

[4] Les montants indexés au 1er janvier 2025 pour le recouvrement sont : 51,54 € à la place de 50 € pour le forfait de frais administratifs ; 103,08 € à la place de 100 € comme montant maximum pour l’honoraire de recouvrement ; 15,46 € à la place de 15 € pour le montant minimum de l’honoraire de recouvrement. Donc, en 2025, l’honoraire de recouvrement est fixé soit à 103,08 € pour les dettes d’énergie qui atteignent 1288,5 € ou plus, soit à 8% de la dette avec un minimum de 15,46 € pour les dettes de moins de 1288,5 €. Le montant de 25 € lié aux démarches de saisie est indexé à 25,77 €.

[5] Ou bien si le consommateur respecte à la lettre le plan de paiement que le juge lui a accordé.